L’abord de chaque élection présidentielle est l’occasion de parutions multiples. Quelques unes sont opportunistes, comme autant de rampes de lancement pour le printemps prochain. D’autres sont opportunes et font émerger des questions dont il faut s’emparer pour le court comme pour le long terme.
La dernière parution dirigée par Laurent Baumel et François Kalfon fait partie de la dernière catégorie. Plaidoyer pour une gauche populaire rebondit sur le débat entamé il y quelque temps entre Terra Nova et Laurent Baumel sur la définition de l’électorat de gauche. Il y affirmait que l’hypothèse d’une droitisation et d’une dépolitisation des couches populaires menant au ciblage exclusif par les socialistes des classes moyennes urbaines était sans doute trop rapide. Il y posait déjà pour la gauche la nécessité de nouer de nouvelles alliances avec l’électorat populaire. L’ambition des auteurs rassemblés est de tracer les axes de ce rassemblement.
Parmi ces contributions celle du sociologue Alain Mergier autour de la notion d’insécurité me semble bien cerner les mécanismes qui ,de dégradations en dégradations, peuvent précipiter une grande part de l’électorat dans l’abstention ou dans les filets du Front national .On pense bien entendu à l’insécurité physique, thème largement investi par la droite sans que pour autant elle y trouve une issue comme le montre le triste bilan de Nicolas Sarkozy .On ne pense pas dès l’abord à l’insécurité économique . Longtemps le contrat social maintenant dissous garantissait aux travailleurs qualifiés et investis un emploi stable et une rémunération en progression. Ce dernier élément a été le premier à disparaitre. On a pu ensuite penser que la valorisation libérale de l’investissement individuel permettrait à force d’engagement dans l’entreprise à au moins se garder la sécurité de l’emploi à défaut de la progression du pouvoir d’achat. Cela n’est même plus vrai tant l’emploi peut s’évaporer sans raison apparente dans des entreprises qui semblent en bonne santé mais qui ne sont pas pour autant performantes au regard de la rentabilité financière. La rupture avec le credo libéral est double : en premier lieu la prospérité des élites était sensée entrainer celle de la masse des salariés. Il n’en est rien puisque plus les nantis vont bien et plus les classes populaires vont mal. En second lieu ceux qui avaient mis tous leurs espoirs dans la doxa sarkosyste de l’effort et du mérite individuel en sont pour leur frais. La crise frappe indistinctement sans ménager qui que ce soit.
Arrivé à cet endroit la spirale est destructrice. La chute économique c’est celle qui coupe des moyens de communication contemporains devenus essentiels. La perte de revenus c’est la perte du moyen de transport indispensable à des populations de plus en plus implantées dans les zones périurbaines. Au bout du calvaire intervient de plus en plus souvent la perte la plus insécurisante qui soit, celle du logement.
Dès lors lesinquiétudes les plus instinctives sont en place. J’avais évoqué dans ce blog les peurs agitées par le Front National et qui vise les terreurs essentiels qui se nichent dan le cerveau reptilien. Nous y sommes et pour peu que l’on joue sur l’insécurité identitaire et culturelle l’individu écrasé est prêt pour l’abandon ou l’illusion des populismes. Quand par-dessus cela un Wauquiez montre du doigt les tricheurs qui vous sont si proches on peut oublier de questionner l’ensemble de l’échelle sociale sur ce fiasco tragique qu’est notre société à l’abord de 2012.
La responsabilité de la gauche est majeure. Elle doit renouer avec un discours qui englobe la société dans son ensemble et qui l’engage à nouveau dans l’établissement d’un contrat social qui se donne pour priorité la défense et la promotion des classes populaires. « Il faut que dans cinq ans on puisse dire que l’on vit mieux et que nos enfants vivront encore mieux que nous » disait François Hollande pendant la campagne de la primaire. Pour que les citoyens relèvent avec nous ce défi il nous faudra aller massivement à leur rencontre pour leur dire comment nous voulons leur redonner espoir. Pour cela nous devrons au-delà de nos forces militantes mobiliser celles et ceux qui ont fait de la primaire un succès pour nous aider à relever le défi d’une campagne qui parle à celles et ceux qui ont le plus besoin de changement.
En attendant et pendant les quelques jours encore propices à la réflexion je vous recommande la lecture du livre de Laurent Baumel. En 114 pages vous y trouverez de quoi affermir nos convictions et aiguiser nos arguments. Bonne lecture et à bientôt en campagne.
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